L’automutilation juvénile, un mal-être

Victoria Tabcharany | 29/01/2016

Actu Ados

Psychologie

Récemment, les réseaux sociaux et les médias ont mis l'accent sur un phénomène observé en clinique depuis le début de la psychiatrie. Dr Toni Saouma, psychothérapeute, nous éclaire sur les comportements scarificateurs.

«Les premières victimes sont les personnalités borderline, les états limites qui se caractérisent par une certaine impulsivité, commence Dr Saouma. Instables, ils présentent des comportements pathologiques à risques. Il y a aussi les jeunes en manque d'amour. Leur raisonnement sous-jacent est que personne ne se soucie d'eux, donc leur corps ne vaut rien. L'automutilation est parfois un moyen d'attirer l'attention, surtout chez ceux qui n'arrivent pas à exprimer verbalement leurs sentiments. On la trouve également chez des victimes d'abus.»
Des facteurs extérieurs peuvent déclencher la crise, comme une agression ou un sentiment d'impuissance. Munis d'une lame de rasoir ou d'un cutter, ces adolescents tentent d'évacuer leur frustration en se blessant, notamment au niveau des bras. Ceci déclenche la sécrétion d'endorphine et de dopamine, qui produisent une sensation d'euphorie. Paradoxalement, au seuil de la douleur, il est possible de ressentir du plaisir. Les actes masochistes se multiplient et entraînent la dépendance.

Un problème identitaire dangereux
«L'adolescence est une période difficile, où l'individu cherche à se définir, explique Dr Saouma. Sans repères, il tente de contrôler sa vie en traçant lui-même son identité, de manière tangible, sur son propre corps. Il cache ensuite ses cicatrices en portant des manches longues. Il souffre souvent d'inadaptation et d'isolement social. Il court des risques physiologiques graves, dont l'infection, le tétanos ou l'hémorragie. Si quelqu'un a un ami qui se mutile, il doit l'exhorter à se tourner vers un professionnel. En cas de refus, il doit avoir le courage de prévenir lui-même un adulte compétent, comme l'assistant social ou le psychologue scolaire, pour éviter des troubles mentaux aggravés.»
Confrontés au problème, certains parents se sentent coupables et rejettent la responsabilité sur leur enfant. La meilleure attitude à adopter est le recours à la thérapie.
«Des médicaments sont parfois prescrits pour calmer l'impulsivité, raconte Dr Saouma, mais une thérapie à long terme est axée sur l'affirmation personnelle. L'adolescent se réconcilie avec l'image de ses parents, tout en développant une image positive de soi. Il apprend à gérer sa colère d'une façon saine, respecter son corps et bien choisir ses amis.»
À l'adresse de ceux qui souffrent secrètement de ce mal, Dr Saouma ajoute: «Tu n'es pas le premier à le faire. D'autres ont pu surmonter l'épreuve et ont trouvé le bonheur. Il suffit d'avoir le désir de changer, et d'accepter l'aide d'un professionnel.»

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